• Le sculpteur

     

    Il vit cet instant de vérité comme l’on torture dans la braise un fer pour façonner une œuvre qui l’obséderait. Depuis longtemps dans sa cachette, l’atelier où il vivait, il avait accouché à grands coups de plaisir d’une œuvre gigantesque. Le temps est son ami et pourtant de l’avoir enfermé jour après jour sans compter, aujourd’hui il lui rappelle que la vie n’est pas un rêve.De long en large il marche, dans cette grande salle voutée aux éclairages convexes qu’un plafond cintré éparpille sur des morceaux de grés où jaillissent des formes en arabesques, d’un fer poli et forgé, d’une vie à aimer.Il est blessé, pas d’exposer ses amours qu’il à fait naître, mais qu’il eut fallu qu’à chacune d’elles sur un livre numéroté, donner un prix comme de vulgaires objets.Il arpente l’immense pièce où résonnent ses pas, donnant à chacune d’elles la petite caresse comme pour dire ne vous en faites pas, je suis là. Puis, quand il arrive au milieu sous le grand cintre où elle est posée dans une rose de marbre veiné de bleu, il s’arrête, silencieux. Des tiges élancées comme des traits de pluie qu’un ciel aurait planté, son chef d’œuvre, celui par qui la passion s’est inspirée. Il ne peut s’empêcher de contempler avec tendresse, lançant un regard amoureux sur ce grand corps brillant dans une robe de lumière brodée de mille petits coups de repoussoir, mélangeant le bronze et l’acier.De cette fascination qui le hante, cette nuit il espère l’instant où elle lui prendra la main pour l’emmener très loin. Il ne pouvait imaginer devoir s’éloigner d’elle, comme elle le fit la première fois. Depuis dix ans elle a toujours était là devant le balcon fenêtre, cette  grande baie où chaque fois que son absence était trop dure à supporter, il l’a rejoint  pour évoquer un moment de sa vie qu’il ne comprend pas.Petit, il avait vécu comme un roi au milieu de paysages baignés dans les couleurs d’un ciel bleu, entre une terre rouge qui se couvre de thym et d’arbouse au milieu d’un rocher, posé sur la psyché d’une mer qui l’a toujours aguiché. Au bout du port, sous le phare de la jetée, il avait son trône d’enfant flibustier. Il rêvait à ces contrées lointaines qu’un vieux marin assis non loin de là, une canne à la main, comme le cordage du grand six mâts qu’il n avait jamais lâché et que de ses récits faisait voyager.Tous ses souvenirs qui reviennent, d’un rêve ou d’un cauchemar, comme la cicatrice parcheminée sur sa cuisse, qu’il effleure du bout des doigts, la main dans la poche, vivant ces instants cachés..//..N a 


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